Épisode 22. Conflit éthique

Contexte
- Espace
- Orbite basse Terrestre
- USS Mercator
- Module 3
Personnages
Nom | Affiliation / Branche | Titre / Grade |
---|---|---|
Agnes V. Rodriguez | OTAN / Flotte Spéciale | Capitaine |
Angie Chen | OTAN / Flotte Spéciale | Commandeur |
Éric Corda | OTAN / Flotte Spéciale | Lieutenant-Commandeur |
Émilie Flores | OTAN / Flotte Spéciale | Enseigne |
Charlène Savea | OTAN / Flotte Spéciale | Lieutenant |
Manu | OTAN / Flotte Spéciale | Civil réquisitionné |
Manifeste
USS Mercator | |
---|---|
Affiliation | OTAN |
Localisation | Orbite Basse Terrestre |
Capitaine | Agnes V. Rodriguez |
Premier officier | Angie Chen |
Pilote | Éric Corda |
Communications | Émilie Flores |
Opérations | Charlène Savea |
Armement avancé | Eros Vitos |
Infirmerie | Victor S. Calpel |
Technicien de surface | Manu |
Passagers | 12.000 Réfugiés (Estimation) Dirigeants (Hillary Clinton et autres Chefs d'état) |
Récit
Angie étant encore un peu faible, je la prends par les bras. Nous sortons de la cabine de pilotage où je peux voir les infirmiers, les officiers et même des civils qui viennent en aide au millier de passagers du module 3. Ils semblent être entre de bonnes mains.
On remonte sur la passerelle. Tu nous accompagnes Manu ? J'ai encore 2-3 bricoles à te proposer.
Sur la passerelle ? heu, mais c'est interdit !
Tu as mon autorisation pour cette fois, Manu.
Dans ce cas, j'accepte ton offre.
Nous traversons les couloirs dans un silence relatif, brisé par le bourdonnement des systèmes en redémarrage et les murmures des rescapés. Les lumières vacillent encore par endroits, projetant des ombres tremblotantes sur les murs endommagés. Les traces de la tempête nucléaire que nous avons affrontés sont encore visibles : câbles arrachés pendant, cloisons déformées, et ici et là, des techniciens s’affairant à remettre de l’ordre.
On dirait que les ingénieurs ont pris les choses en mains. Les éclairages, certains accès aux sections du vaisseau et même l'ascenseur fonctionnent à nouveau. Tu as bien formé tes équipes Angie.
Ce sont des professionnels. Mais il y a dû avoir du grabuge pendant mon absence pour qu'il y ait autant de dégâts. T'as traversé un cyclone ou quoi ?
Pas un cyclone Angie, un champignon !
Mince alors. Et dire que j'ai raté ça.
Si tu avais été là, tu aurais fait dans ta culotte, je t'assure.
À ce point ?
Dites les filles, au lieu de djâser come on canari, vous feriez mieux d'entrer dans l'ascenseur ! Je vous attends !
On arrive Manu.
J'ai une petite question indiscrète. Vous avez l'air de bien vous connaître. Vous êtes amies ?
Angie et moi sommes plus que de simples amies, nous sommes en couple Manu.
Aah, heu, oui, heu, je vois. Je ne m'attendais pas à ce genre de réponse. Je suis désolé pour mon indiscrétion.
Ne le sois pas Manu, on a l'habitude. Allez viens, on est arrivé sur la passerelle. Surtout ne touche à rien.
Promis, je ne touche à rien, Agnes. Heu, j'voulais dire Cap'tain.
Dès notre entrée sur la passerelle, l’ambiance est bien différente du chaos que nous avons laissé derrière nous. Loin d’être parfaitement opérationnelle, elle retrouve peu à peu son efficacité. Corda est debout près de son poste, en train de recalibrer les commandes de navigation. Savea, penchée sur une console, passe en revue une série de diagnostics. Non loin, Flores ajuste les fréquences des communications, le visage marqué par la fatigue. Malgré l’épuisement, chacun s’active avec une concentration redoublée. On a encore un vaisseau à sauver.
Je jette un coup d’œil vers Angie, qui balaie du regard l’état de la passerelle. Son expression parle pour elle : elle sait que le Mercator a encaissé, mais elle semble satisfaite des efforts en cours. À côté de moi, Manu se fait discret, les mains enfoncées dans ses poches, absorbant la scène avec un mélange d’étonnement et de respect. C’est un univers qu’il ne connaît pas, et pourtant, il est désormais au cœur de la machine.
Manu, je te présente le lieutenant-commandeur Éric Corda, notre pilote. Le lieutenant Charlène Savea qui s'occupe des opérations et notre officier des communications, l'enseigne Émilie Flores. Tu peux prendre place sur le siège à côté de cette console.
Capitaine, je suis heureuse de voir que la Commandeur Chen soit toujours en vie.
Merci Flores, croyez-le bien, moi aussi. Asseyez-vous tous. Comme la salle de réunion est occupée par nos dirigeants, on fera le point ici. Savea, on commence par vous. Quel est l'état du vaisseau ?
Nous avons perdu près de 90% de la coque et de son bouclier thermique. J'essaie de maintenir la régénération de notre bouclier énergétique à 3% et j'ai transféré le reste de nos réserves vers les systèmes vitaux. En tout et pour tout, il nous reste approximativement entre 36 et 48 heures d'autonomie. Quant à la structure, nous avons des défaillances à tous les niveaux et nous n'avons aucun moyen pour consolider les zones les plus endommagées.
Merci Savea. Qu'en est-il des passagers et de l'équipage ?
Aucune perte n'a été signalée dans la salle de réunion des chefs d'état. J'ai étendu leur espace alloué aux deux pièces adjacentes, le mess et à la salle de repos où des couchettes supplémentaires sont en train d'être installées.
Et pour les réfugiés ?
À cette heure, nous n'avons aucune information sur les pertes, mais nous savons qu'il y en a. Nous avons aussi appliqué le dispositif non-létal 1.1 dans les modules 5, 6 et 7, comme vous nous l'avez ordonné pour contrer les émeutes.
Je suppose que vous n'avez pas le nombre exact de rescapés que nous avons récupérés à Bruxelles ?
Non Capitaine. En théorie, notre capacité est de 10.000 personnes. 1.000 par module et 2.000 pour le vaisseau lui-même. Toutes les personnes ont été scannées à l'embarquement et je n'ai plus qu'à compiler tous les secteurs.
Flores, à votre tour.
Le système de communications internes est rétabli et j'ai envoyé un appel de détresse en boucle vers la lune. Je n'ai encore reçu aucune réponse, capitaine.
Merci Flores. Corda, c'est vous qui vous êtes chargé des sondes ?
Oui capitaine, je surveille l'espace.
Parfait Corda. Si vous apercevez des signes suspects ou l'ovni que nous avons croisé à Bruxelles, vous me le signalez.
Bien évidemment capitaine !
Des ovnis, vous êtes sérieux là ?
Je t'en prie Manu, ne nous interromps pas.
Pardon Cap'tain.
Bon ! on se concentre maintenant sur l'essentiel. Est-ce qu'on est en mesure de rallier la lune ? Corda, votre avis.
Pour l'instant, je n'ai qu'une impulsion minimale, juste de quoi nous maintenir en orbite autour de la Terre. L'ingénierie travaille pour récupérer de l'énergie.
Savea, est-ce que l'ingénierie a la capacité de transférer progressivement de la puissance aux moteurs pour qu'on puisse atteindre la lune ?
En théorie oui, mais ça signifie qu'on devra puiser dans toutes nos ressources, y compris les systèmes de survie. Si on se rend sur la lune dans ces conditions, on sera tous morts avant d'y arriver. Capitaine.
Numéro Un, vous avez des suggestions ?
Oui capitaine. Nous pouvons envisager d'appliquer le dispositif non-létal 1.3 à tous les modules verrouillés et nous économiserons 70% d'énergie qui pourront être transférés vers les systèmes de navigations comme les impulseurs et les stabilisateurs. Tout cela en tenant compte qu'il faudra naviguer en roue libre en exploitant au maximum l'inertie et les trajectoires gravitationnelles. On en est au point où chaque impulsion et chaque correction de trajectoire nous coûtera un os.
C'est extrême comme solution Numéro Un. Je n'aime guère l'idée d'utiliser le 1.3. Ils seront tous plongés dans un sommeil profond.
Nous sommes aussi dans une situation extrême capitaine.
Vous avez raison Numéro Un. Ce qui m'inquiète, ce sont les conséquences. Le réveil risque d'être brutal pour ces personnes. Ils auront l'impression qu'on les a gazés.
C'est l'une des raisons pour lesquelles son emploi n'est autorisé que dans des situations extrêmes, capitaine.
Quel est ton avis Manu ? Que penserais-tu si tu étais à la place de ces gens ?
Je ne sais pas Agnes, heu pardon, Cap'tain. Je n'ai jamais été confronté à ce genre de situation. Mais je suppose que je serais sous le choc et que j'en voudrais énormément à ceux qui ont pris cette décision parce que je n'aurais pas compris dans quelle galère on se trouve.
Merci Manu. Savea, d'après les chiffres que vous disposez, ce plan est réalisable ?
Je termine les calculs, capitaine. Voilà. heu, c'est vraiment trop juste, mais on peut y arriver si on commence tout de suite.
Dans ce cas, ne trainons pas. On passe directement au vote. Qui n'est pas favorable au plan ?
Un silence s’installe. Je scrute mon équipage. Chacun a conscience de ce que cela signifie. Pas seulement un endormissement forcé… mais une perte de contrôle, un abandon temporaire de leur destin. Une seconde passe. Puis deux.
Personne ? C'est parfait. Le plan est adopté. Savea, vous pouvez commencer la procédure. Corda, tracez une trajectoire vers la lune et faites avancer notre épave. Flores, continuez à envoyer le signal de détresse.
À vos ordres capitaine.